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Les humeurs de Violette
Les humeurs de Violette
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Poussière

Poussière

Jusqu'à aujourd'hui je n'aimais pas relire; encore moins un livre lu et aimé à l'adolescence depuis une expérience douloureuse avec Jeanne Bourrin.

(et oui, à treize ans j'étais une indécrottable romantique fanatique de Jeanne Bourrin, je les avais tous lus)

(en même temps il y a pire, j'aurais pu être fan des Worlds Apart)

(bon ok, j'étais fan des Spice Girls)

(mais c'était le Girl Power, c'est pas pareil)

(bon ok, de DiCaprio aussi)

(mais c'était l'effet Titanic, ça ne compte pas vraiment)

(en plus ça n'a pas duré)

(ma préférence allait aux Amours blessées, ce qui m'a valu beaucoup de déceptions à cet âge, je rêvais d'un poète et de bals à la cour)

(un beau jour, devenue adulte et revenue des poètes et des bals à la cour, j'ai voulu relire les Amours blessées, obéissant à une nostalgie secrète et impérieuse)

(...)

(comment dire...)

(passé treize ans, Jeanne Bourrin ce n'est définitivement plus possible)

 

Depuis ce jour maudit, je m'étais jurée de ne plus jamais rien relire qui m'avait tant soit plu dans le passé, de peur de vivre à nouveau une déception cuisante.

C'était sans compter la force d'attraction de la collection Libretto (aux éditions Phebus).

Je suis totalement raide dingue de cette collection, avec ses couvertures délicieusement surannées, son format agréable et son papier de qualité... C'est vraiment ma collection préférée, la seule qui me fait succomber à chaque fois, la seule où j'ose me lancer sans crainte avec un auteur que je ne connais ni d'Eve ni d'Adam, car je ne suis jamais déçue.

 

Allant acheter L'oeuvre dans une de mes librairies préférées (A tout lire, un agréable fouillis de pile où je pourrai rester des heures, si seulement mon budget était illimité..), je l'ai vu, au-dessus de la pile, me faire de l'oeil.

Oui, c'est vrai, je l'avais déjà lu, à quatorze-quinze ans peut-être, je l'avais aimé mais mon souvenir n'était pas plus précis que cela.

Et comment résister à une si belle couverture?

 

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Je l'ai dévoré, je ne pensais plus qu'à lui, à Judith, Roddy, Martin et les autres jusqu'à la dernière page.

 

J'avais à nouveau quatorze ans.

 

On en a déjà parlé au Club, l'état d'esprit dans lequel on se trouve influe toujours sur nos lectures.

Pour ma part, je redeviens adolescente chaque été. Chaque été, je suis nostalgique des grandes vacances (deux mois quand même!) lorsqu'on est encore collégien, de l'ennui, de la chaleur, doux rythme estival... Chaque été je me rappelle les feux d'artifice du 14 Juillet, l'odeur de renfermé des Gîtes de France, les balades le soir après dîner, le bruit de la nuit, les jeux, les rêveries... Chaque été je me surprends à vouloir remonter le temps...

 

J'étais donc naturellement disposée à succomber à ce roman, parfaitement de saison pour moi.

Un roman initiatique par excellence, où la jeune et belle Judith va faire l'expérience des tragédies de l'adolescence, les joies et cruautés des ambiguës liaisons adolescentes (amicales ou autres), des premiers frissons...

Comment ne pas se reconnaître en Judith? Qui n'a pas fantasmé et idéalisé ses voisins? Qui n'a pas eu d'amitié passionnée et douloureuse?

Rosamond Lehmann décrit comme personne l'émoi de ces âges-là (enfance, adolescence, tous débuts de l'âge adulte), sans jamais tomber dans la sensiblerie niaise et mièvre, restituant à merveille l'atmosphère d'une fin de soirée exaltée comme celle d'une salle d'examen.

 

Un roman d'une stupéfiante beauté, et d'une extrême sensualité, tous nos sens étant sollicités par la beauté, la chaleur, la fraîcheur, les odeurs des personnages et des lieux.

Le tout dans une ambiance que j'affectionne particulièrement car propice aux fantasmes: l'Angleterre de l'entre-deux-guerres, Cambridge, les stations thermales où la jeunesse dorée joue au tennis et boit des cocktails...

 

Dieu que c'est bon d'avoir à nouveau quatorze ans!