Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Les humeurs de Violette
Les humeurs de Violette
Menu
J'ai réussi à rester en vie

J'ai réussi à rester en vie

1222128-gf.jpgJoyce Carol Oates est l'un des auteurs que je suis de près.
Je n'ai pas lu le quart de ses oeuvres tant la dame est prolifique, mais mes souvenirs de lecture les plus forts sont souvent associés à son nom, qu'il s'agisse de Blonde (que je n'ai jamais réussi à terminer tant il me retournait), des Chutes, ou encore des Mulvanney.
Derrière l'écrivain j'avais découvert la femme grâce à son Journal, et m'étais même étonnée de la découvrir sous un jour si paisible, elle dont les récits interpellent et dérangent souvent. On a beau savoir que l'on n'est pas ce qu'on écrit, cette "normalité" m'avait frappée, si idiot que cela puisse paraître.

J'avais alors été très impressionnée par l'équilibre qu'elle maintenait entre ses plusieurs vies: sa vie de professeur qui la passionne et où elle s'implique totalement, sa vie "publique" en tant que JCO (lectures, conférences, parutions...), sa vie d'écrivain pure et dure (comment son travail d'écriture avance, en parallèle de collaborations à diverses revues, publications d'essais, critiques ou même poèmes) et sa vie de femme, d'épouse heureuse, de Joyce Smith.

Quand J'ai réussi à rester en vie est paru, j'ai forcément eu envie de le lire, mais en même temps ce récit me faisait peur; ce n'était sans doute pas le bon moment. Et puis je l'ai trouvé il y a quelques temps posé en évidence chez le libraire, en poche en plus, alors pourquoi pas?

C'est un récit âpre, difficile, éprouvant sans aucun doute car il embarque le lecteur dans le désesespoir et le désarroi de la Veuve - ainsi qu'elle se prénomme elle-même.

De l'hôpital à l'été qui suit le décès de son mari, on suivra sa fausse convalescence (car on ne se remet jamais entièrement d'une telle perte, ainsi que lui apprend une amie, veuve depuis plus de vingt ans): tenter de regagner la surface, tâcher de survivre, jusqu'à ce constat final: "J'ai réussi à rester en vie".

Mais Joyce Carol Oates se remémorera aussi les moments heureux de la vie à deux, félicité dont elle est consciente, et soulignera l'importance, voire même la crucialité de l'amitié dans ces moments si douloureux.

Sans aucune complaisance ni aucun apitoiement à l'égard de la Veuve, ce récit frappe par son intelligence et son honnêteté. La plume si fine de Carol Oates est touchante et criante à la fois, pleine d'une vie presque instinctive, et ce même dans ses élans les plus désespérés.

 

Plus qu'empreint de tristesse, ce récit est pour moi empli d'une force vitale finalement indestructible.

"Si le sens de ma vie et l'amour de ma vie ont disparu, je peux encore trouver de petits trésors dans des déchets épars."