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Les humeurs de Violette
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Jézabel

Jézabel

photo-2--copie-1.JPGIrène Némirovsky fait partie des auteurs que j'affectionne particulièrement et dont je me retiens de lire tous les livres d'une traite, essayant de fractionner le plaisir pour le faire durer davantage.

J'aime son écriture précise et tranchante, son regard sans condescendance ni mépris qu'elle pose sur nos travers humains, et suis à chaque fois impressionnée par son intelligence.

 

La lecture de Jézabel était différente, sans doute car le sujet est nettement plus dérangeant.

Gladys Eysenach, richissime et belle veuve, est accusée du meurtre de Bernard Martin, jeune étudiant de vingt ans.

Au travers des interrogatoires se dessine le portrait d'une "femme du monde, d'une grande beauté, riche, adulée", issue d'une "société mouvante, cosmopolite, qui n'a d'attaches ni de foyer nulle part"... mais la réalité est autrement plus douloureuse.

Difficile d'en dire plus sans divulguer la suite du roman, où l'on va peu à peu découvrir la personnalité de Gladys.

Eprouvant au départ une réelle compassion pour ce personnage (le déroulement de son procès y ayant largement contribué), je fus progressivement à la fois fascinée et écoeurée par cette femme dans le contrôle permanent, se perdant dans la poursuite éternelle de sa jeunesse (il faut dire qu'avant la Première Guerre une femme était finie à quarante ans). Une femme mue par le désir de plaire aux hommes, mais aux femmes aussi, une femme voulant être aimée plus qu'aimer ("Vous vous laissiez aimer"), prête à tout pour continuer à exercer ce pouvoir si grisant...

Comme l'obsession de Gladys, la tension va crescendo tout au long du livre, et il est difficile de le lâcher malgré le malaise qui s'installe.

J'ai été dérangée par cette lecture, sans doute parce que cette question du temps qui passe, du contrôle, qui restent finalement très contemporaines (voyez Madonna), a touché quelque chose en moi. L'angoisse du temps qui s'écoule, ses dommages et les disparitions qu'il entraîne sur son passage, son acceptation sont autant de questions qui me préoccupent, même si cela peut sembler risible au vu de mon âge.

Si j'ai été soulagée en refermant ce roman, j'ai surtout été impressionnée par Irène Némirovsky, qui réussit à dépeindre ce monstre à la fois humain et dépourvu d'humanité qu'est Gladys sans la condamner, faisant une fois de plus la preuve de son talent.